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SERVICES D’URGENCE : Des premiers répondants, une solution pour sauver des vies? (2 de 2)

Les représentations des élus du « Val-7 » pour obtenir une deuxième ambulance pour la région risquent de rester lettre morte. Malgré l’annonce, le 29 février dernier, d’investissements de 630M $ dans le système préhospitalier d’urgence, aucune somme n’est allouée pour l’Estrie. Interrogé à ce sujet par Le Val-Ouest, le CIUSS de l’Estrie-CHUS a confirmé que l’ajout d’une ambulance n’est pas prévu (voir autre article).

Une solution : un service de premiers répondants

L’une des solutions alternatives envisagées est l’instauration d’un service de premiers répondants. C’est-à-dire de personnes formées pour intervenir rapidement sur le lieu d’un incident, avant l’arrivée des services ambulanciers.

C’est le souhait le plus cher de Laury Bourassa, 24 ans, résidente du Canton de Valcourt. Depuis plus d’un an, elle travaille d’arrache-pied pour convaincre et mobiliser les élus et les citoyens d’adhérer à un tel projet. Son objectif est que les municipalités travaillent ensemble à créer un tel service de premiers répondants. Permettant ainsi de sécuriser le territoire et faire une différence quant à la rapidité d’intervention.

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Laury Bourassa, résidente du Canton de Valcourt, travaille d’arrache-pied pour convaincre et mobiliser les élus et les citoyens d’adhérer à un projet de premiers répondants. (photo : gracieuseté)

Un intérêt pour les soins d’urgence dans le Val-7

Tout commence en 2018. Un membre de la famille de Laury Bourassa a un problème cardiaque qui nécessite une intervention d’urgence. Réalisant que l’ambulance n’arrivera probablement pas à temps, la jeune femme choisit d’emmener son proche à l’hôpital par ses propres moyens. Malgré de petites séquelles, tout s’est heureusement bien terminé.

La jeune femme décide alors de quitter ses études en soins infirmiers pour plutôt devenir paramédic (ambulancière). Elle s’intéresse alors de plus près à la situation des soins préhospitaliers d’urgence dans la région du Val-7.

Les pompiers ne sont pas des premiers répondants

Les constats de Laury Bourassa l’étonnent. « Non seulement il n’y a qu’une seule ambulance pour la région, mais j’ai réalisé qu’il n’y avait pas non plus de service de premiers répondants. Dans ma tête, je croyais que les pompiers offraient ce service », partage-t-elle.

De fait, bien que les pompiers de la Régie intermunicipale de protection contre l’incendie de Valcourt offrent des premiers soins lors d’un incendie ou d’un incident, ils n’ont pas de formation comme premiers répondants. Ce n’est pas non plus dans leur mandat actuel.

Une ambulance pas toujours sur place

Pour Laury Bourassa, il ne fait aucun doute que la mise en place d’un tel service pourrait offrir un délai de réponse plus rapide et sauver des vies. Elle en donne pour exemple un stage qu’elle a effectué l’an dernier en soins préhospitaliers dans la région. « Nous avons reçu un appel à 16 h 45 pour déplacer en urgence un patient à l’hôpital de Granby. À notre départ de Granby, nous avons reçu un autre appel urgent dans le secteur de Valcourt. Nous sommes donc revenus dans la région. Cette fois, nous avons transporté une personne à l’hôpital à Sherbrooke. Nous avons ensuite reçu un appel en provenance du territoire de Sherbrooke. Auquel nous avons répondu parce que nous étions le véhicule ambulancier le plus près. Nous avons été de retour à 22 h 30. Ce jour-là, le territoire du Val-7 a donc été à découvert, c’est-à-dire sans ambulance, de 16 h 45 à 22 h 30 », explique-t-elle.

Rencontre avec les élus

L’an dernier, après avoir bien analysé la situation, Laury Bourassa a pris son bâton de pèlerin pour rencontrer les élus des sept municipalités du Val-7. « Ce que j’ai dit aux maires, c’est que si nous intervenons tout de suite, nous pourrions être capables d’éviter quelques décès. Même si le projet peut prendre quelques années à mettre en place », rapporte-t-elle. Résultat : ceux-ci ont décidé de former un comité de travail pour étudier la question.

En septembre 2023, la municipalité de Racine a même invité Laury Bourassa à présenter publiquement le projet aux citoyens lors d’une assemblée.

En septembre 2023, la municipalité de Racine a invité Laury Bourassa à présenter publiquement le projet de premiers répondants aux citoyens. (image : TVME)

« Nous prenons la responsabilité du gouvernement »

Bien qu’il soit ouvert à la mise en place d’un service de premiers répondants, le maire de Racine, Mario Côté, préfère l’ajout d’une deuxième ambulance. «Nous sommes mal couverts par les ambulances. Si nous mettons en place un service de premiers répondants, nous venons de prendre une part de la responsabilité du gouvernement. Je ne suis pas nécessairement contre. Mais ce serait un gros coût pour la population», croit-il.

Pour le maire, les deux initiatives (ajout d’une ambulance et premiers répondants) sont liées. « Au final, ce sera l’une ou l’autre », résume-t-il.

« Si nous mettons en place un service de premiers répondants, nous venons de prendre une part de la responsabilité du gouvernement », croit le maire de Racine, Mario Côté. (crédit photo : Municipalité de Racine)

Des services qui existent déjà ailleurs

Selon Laury Bourassa, l’ajout d’une deuxième ambulance pourrait coûter 1M $. Alors que la mise en place d’un service de premiers répondants exigerait des investissements d’environ 600 000 $ la première année. Il y aurait ensuite des frais fixes annuels, moindres, dont le montant exact serait à déterminer.

Bien que les coûts soient élevés, la jeune femme croit que le projet de premiers répondants est possible. Elle en donne pour exemples les municipalités de Waterloo et Warden, qui se sont associés ensemble pour offrir un tel service. C’est aussi le cas de Béthanie, du Canton de Roxton et de Roxton Falls. Ailleurs en Estrie, Ville de Lac-Brome et Bolton-Ouest ont emboité le pas.

« Ça va être vital dans les prochaines années »

Laury Bourassa est bien au fait de la situation économique actuelle et des budgets municipaux qui sont serrés. « Je comprends que c’est un projet qui demande beaucoup d’argent. Je peux comprendre qu’il faut vraiment y penser deux fois. Mais ça va être vital dans les prochaines années. »

Elle explique que les municipalités qui ont démarré de tels projets ont effectivement eu à débourser des sommes importantes. Elles ont toutefois aussi obtenu des subventions gouvernementales. De même, des donateurs ont choisi de contribuer financièrement. « Les entreprises pourraient faire des dons qui sont déductibles d’impôt. Ce qui permettrait de faire descendre la facture des municipalités », croit-elle.

Des services pour une population vieillissante

La population de la MRC du Val-Saint-François est vieillissante. Selon les projections du CIUSS de l’Estrie – CHUS, environ une personne sur quatre, soit 25 %, sera âgée de 65 et plus en 2026. Ce qui augmente les risques de problèmes de santé nécessitant un transport par ambulance.

Position gouvernementale

Le gouvernement du Québec, de son côté, semble vouloir appuyer le développement d’activités de « nature parahospitalière »». Dans sa Politique sur le système préhospitalier d’urgence, adopté en 2022, il se donne d’ailleurs comme objectif d’accroître le nombre de citoyens formés en premiers secours.

Le CIUSS de l’Estrie-CHUS va dans le même sens. Il dit appuyer cette volonté d’instaurer un service de premiers répondants pour le secteur de Valcourt. «Nous sommes disposés à aider les différentes municipalités à faire ce déploiement quand elles le jugeront nécessaire », indique Nancy Corriveau de l’équipe des relations médias.

Qui seraient les premiers répondants?

Dans le cas où ce projet verrait bel et bien le jour, qui seraient les premiers répondants? Des pompiers ou des citoyens formés? Frédéric Martineau, directeur de la Régie, souhaite rester impartial sur cette question, compte tenu que la décision finale sera prise au niveau politique. Il confirme toutefois qu’il assiste aux réunions du comité sur le projet de premiers répondants. «Toutes les options sont en train d’être étudiées en ce moment. Mais on ne sait pas comment ça va finir. C’est vraiment préliminaire », signale-t-il.

Frédéric Martineau, directeur de la Régie intermunicipale de protection contre l’incendie de Valcourt, souhaite rester impartial sur le projet de premiers répondants. Compte tenu que la décision finale sera prise au niveau politique.  (crédit photo : Régie)

Un enjeu « très important pour la communauté »

Laury Bourassa croit que ce dossier est un enjeu majeur pour la communauté. « Il y a des gens qui vont penser : pourquoi est-ce que je paierais, alors que ça ne m’arrivera jamais. Mais le jour où ça arrive à soi-même ou à un proche, on s’en mord les doigts. Si le projet allait de l’avant, on paierait peut-être un montant de plus sur nos taxes municipales. Mais ça servirait à sauver mon enfant, mon voisin, la grand-mère de mon ami… Il faut vraiment avoir cette pensée-là », tient-elle à livrer comme message à ses concitoyens.

« Ce n’est pas vrai que dans la région Valcourt, une personne pourrait mourir parce que le gouvernement ne bouge pas! », conclut-elle.

 

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