Le Val-Ouest

Rapailler nos Territoires : Plaidoyer pour une Nouvelle Ruralité

Avez-vous déjà entendu parler de Stéphane Gendron et la petite municipalité de Huntington ? Si cela fait plusieurs années, ce n’est sans doute pas pour les bonnes raisons. Cependant, l’ancien maire a plus récemment refait parler de lui pour de bonnes raisons. Il a en effet publié un livre très intéressant intitulé : « Rapailler nos Territoires : Plaidoyer pour une Nouvelle Ruralité ».

L’ex-maire de la petite municipalité de Huntington, Stéphane Gendron fut un temps polémiste populiste, un « homme en colère » comme il se décrit. Rien à voir avec le contenu de cet essai dans lequel il offre une analyse percutante de la situation actuelle des régions rurales au Québec.

Reconnaissant que notre modèle de développement économique a atteint ses limites, Gendron affirme qu’il est nécessaire de repenser la ruralité en intégrant les enjeux environnementaux et en favorisant la mixité sociale, la renaissance de la paysannerie et les nouvelles technologies. Son constat sur l’état du monde rural, qu’il connait et documente très bien, est sans appel : un changement de cap est nécessaire.

Changement de cap nécessaire pour le monde rural

Il rappelle ainsi que si l’on souhaite une occupation dynamique du territoire québécois, il est nécessaire de renverser la tendance à la baisse du nombre de fermes plutôt que d’encourager des mégaproductions visant le marché extérieur. En plus de devoir faire face à cette déstructuration, le monde agricole devra également s’adapter aux changements climatiques, mais également au manque de main-d’œuvre. Si l’auteur semble prendre le pari (risquer?) des nouvelles technologies, il insiste également sur l’importance de prendre conscience de l’inévitable évolution de la population.

Entre néoruraux (en augmentation potentielle avec le télétravail) et travailleurs étrangers, la mixité ne serait plus seulement un sujet urbain. L’auteur rappelle en effet que le tiers de la main-d’œuvre agricole du Québec est constitué de travailleurs étrangers qui sont passés de 7800 en 2014 à 17 000 en 2019. Le monde agricole s’il doit se transformer, dois aussi faire partie de la solution et être soutenu financièrement par le gouvernement pour ne pas que cela repose uniquement sur les épaules d’agricultrices et agriculteurs, pour qui la situation est trop souvent déjà difficile.

Rapailler la démocratie municipale

Outre sa sensibilité particulière pour le monde agricole, Stéphane Gendron lance un pavé dans la mare de la démocratie municipale en région en appelant à une nouvelle vague de fusions. En plus du faible taux de participation aux élections, l’auteur pointe du doigt plusieurs problèmes dont les élections par acclamation, le manque de ressources pour avoir suffisamment d’employé.e.s ou encore le ratio élu-citoyen. Stéphane Gendron écrit que : «Il existe 1107 entités municipales au Québec. De ce nombre, 711 ont moins de 2000 habitants et représentent une population 587 567 personnes. Dans ces microentités, le ratio est de 1 élu municipal pour 117 personnes ou 5000 élus pour6,9 % de la population totale du Québec.

À titre comparatif, le territoire de la Ville de Montréal compte 117 élus pour une population de 1 825 208, soit un ratio de 1 élu pour 15 6000 personnes » (p.55). Dans la MRC du Val-Saint-François, pour 32 000 habitant.e.s, il y a 21 municipalités avec environ 5 personnes élues dans chacune d’elles, ce qui donne plus de 100 conseillères et conseillers municipaux : un ratio d’environ 1 élu par 320 habitants.

Tout cela donne matière à réflexion! Pour relever les défis qui sont devant nous, ne devrions-nous pas avoir moins de postes, mais des personnes élues qui consacrent davantage de temps à leurs fonctions au sein d’entités qui ont davantage de ressources ? L’auteur considère qu’il est nécessaire de réformer la gouvernance, mais également le financement des collectivités municipales, principalement basé sur l’impôt foncier, ce qui perpétue les inégalités entre les régions riches et pauvres.

Gendron met donc en lumière un élément trop souvent mis de côté, soit le besoin de repenser le rôle des municipalités rurales en les encourageant à devenir des acteurs politiques capables de mobiliser leur communauté notamment par la participation citoyenne. “Rapailler nos Territoires” est un essai bien documenté qui incite à réfléchir sur l’avenir des régions rurales.

Bien que certaines de ses propositions puissent sembler ambitieuses, elles soulignent l’importance de repenser la gouvernance locale et le développement rural pour assurer un avenir prospère aux régions rurales du Québec. Ce livre est donc une lecture plus que conseillée pour tous ceux qui s’intéressent à ces enjeux cruciaux.

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