photo : Sébastien Michon - Le Val-Ouest
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Yacine Hamdi et son frère Mehdi ont un rêve. Ils souhaitent publier une bande dessinée sur le sujet de l’itinérance. Pour y arriver, ils sont soutenus par le Club des jeunes entrepreneurs de demain (Club Jed) à Sherbrooke. Parmi leurs alliés : le bédéiste Serge Ferrand, qui habite à Racine.

«Depuis que je suis jeune, j’aime les bandes dessinées ainsi que les dessins animés. J’ai grandi avec des BD comme Cédric ou Titeuf», explique Yacine Hamdi. Son frère, Medhi, aussi impliqué dans le projet, n’est pas disponible au moment de l’entrevue.

L’objectif de Yacine Hamdi et de son frère Mehdi : utiliser le médium de la bande dessinée pour mettre en lumière les enjeux liés à l’itinérance.

«Je veux créer une bande dessinée qui parle des enjeux des sans-abris. Mais plutôt que de présenter des personnages tristes et d’avoir pitié d’eux, je veux plutôt qu’on les voit avec un peu d’humour. Leur donner une voix. Qu’on sache ce qu’ils pensent d’eux-mêmes et comment ils se voient. Et aussi comment ils nous perçoivent. Il y a une phrase d’Édith Piaf qui m’a marqué. C’est d’«être une ombre de la nuit». Mon projet, c’est de donner une voix à ces ombres-là qu’on n’entend pas assez.»

Yacine Hamdi (sur la photo) et son frère Mehdi ont un rêve. Ils souhaitent publier une bande dessinée sur le sujet de l’itinérance.  (photo : Sébastien Michon – Le Val-Ouest)

Du soutien du Club Jed

Il y a quelques mois, il rencontre par hasard Anny Jasmin, coordonnatrice du Club Jed dans un événement auquel il assiste. Ils discutent ensemble de son projet. Anny Jasmin lui explique qu’elle peut lui offrir du soutien.

Un hasard qui fait bien les choses, confie-t-il. «Je suis quelqu’un d’assez timide. D’aller voir des gens pour obtenir de l’aide, ce n’est pas quelque chose que je fais naturellement. J’ai eu la chance de tomber sur madame Jasmin. Qui m’a mis en contact avec plein de gens. Jamais ça ne serait arrivé tout seul.»

Le Club Jed est un organisme à but non lucratif qui offre de l’accompagnement et de la formation pour les jeunes entrepreneurs et entrepreneures.

«Nous apprenons aux jeunes à apprendre à entreprendre. Et le résultat importe peu, en fait. Évidemment, on veut que ça fonctionne. Mais ce qu’on souhaite que le jeune retienne, c’est le chemin pour se rendre, les étapes, le savoir-être, le savoir-faire, à quelles portes aller cogner, comment se bâtir un réseau de contacts, etc. Tout est basé là-dessus. Pour montrer aux jeunes qu’il n’y a rien d’impossible et que c’est possible de vivre de sa passion», explique Anny Jasmin.

Elle ajoute :

«On pense souvent que le résultat de l’entrepreneuriat, c’est de faire de l’argent et des profits tout de suite. Non! Être entrepreneur, c’est bien plus «l’fun» que ça. Tu crées ton horaire, tu rencontres des gens et tu réalises qu’il ne faut pas que tu sois seul. Un bon entrepreneur ne se retrouve jamais seul au sommet.»

Anny Jasmin, coordonnatrice du Club Jed de Sherbrooke, offre du soutien à Yacine et Medhi Hamdi pour leur permettre la réalisation de leur projet de BD.  (photo : Sébastien Michon – Le Val-Ouest)

Apprendre à développer son réseau

Yacine Hamdi n’en est pas à ses premières armes en entrepreneuriat. Lorsqu’il était en cinquième secondaire, il a créé avec un ami une petite entreprise de vêtements. Une expérience d’affaires qui a duré quelques mois, avec ses hauts et ses bas.

Cet étudiant à la maîtrise en sciences politiques à l’Université de Sherbrooke avoue qu’il n’a aucune connaissance dans le domaine de la bande dessinée. Il apprécie donc d’autant plus les portes qui s’ouvrent à lui grâce au programme Initiative jeunesse du Club Jed.

Au cours des dernières semaines, Yacine Hamdi a commencé à développer son réseau. En rencontrant des intervenantes et intervenants des organismes Le Tremplein 16-30 et le Centre de jour Ma Cabane, à Sherbrooke.

Un «vieux schnock» qui lève la main

C’est là qu’entre en scène un autre allié pour ce projet : le bédéiste racinois Serge Ferrand. Que Yacine Hamdi rencontrait pour la première fois dans un local de la Maison des jeunes L’Initiative de Valcourt, au moment de l’entrevue avec le Val-Ouest.

«Il y a deux jeunes qui veulent faire de la BD et qui cherchent à avoir des conseils d’un «vieux schnock»? Quand on parle de vieux schnock, c’est sûr que je lève la main. Alors, je me suis proposé! », lance avec humour Serge Ferrand.

Il se dit heureux de pouvoir partager avec eux ce qu’il connait du monde de la bande dessinée et de l’édition. Lui qui a plusieurs décennies d’expérience derrière le crayon.

De fait, dans sa vie passée de journaliste, Serge Ferrand a rencontré les bédéistes Mézières, Fred, F’murr, Christin et Bilal. Puis, passionné par cet art, il décide de retourner vivre en Europe pendant un certain temps pour suivre des leçons avec le dessinateur belge Eddy Paape. Ce qui lui a permis de rencontrer d’autres dessinateurs : Hermann, Dany, Franquin et Tibet, entre autres.

Serge Ferrand publie ses propres BD, Larsène Rupin et Les histoires dingues de l’oncle Barney, au sein du prestigieux magazine Tintin. Et plus tard, dans le magazine Spirou.

Son controversé album de bande dessinée Les Vaginocrates, publié en 1998, lui vaut le prix du meilleur album d’humour au Festival de la BD de Québec.

Le bédéiste publie aussi régulièrement ses «strips», intitulés Les Piafs, dans le Val-Ouest.

Le bédéiste de Racine, Serge Ferrand, offre un coup de main à Yacine et Medhi Hamdi pour leur projet.  (photo : Sébastien Michon – Le Val-Ouest)

Des BD à visées sociales

Au-delà du trait d’humour, il dit que son travail a des visées sociales.

«La bande dessinée, c’est une drogue. Je dessine tous les jours. Je fais des caricatures aussi méchantes que je peux. Parce que j’essaie de me réveiller et de réveiller les autres en même temps. C’est important pour moi. Je ne dessine pas pour passer le temps. Il y a des messages que je veux passer. Je me bats contre la connerie humaine, peu importe d’où elle vient. Que ce soit des hommes, des femmes, de gauche ou de droite.»

Serge Ferrand aime travailler avec les jeunes. Il propose d’ailleurs les ateliers «Je dessine mes rêves» dans les écoles primaires et secondaires. «Je montre aux jeunes et aux moins jeunes comment créer une histoire courte, présentée sur trois cases, avec des personnages. Avec une fin frappante, dans la mesure du possible.»

À 74 ans, Serge Ferrand croit avoir trouvé son style, même s’il affirme encore progresser. «Quand j’étais jeunes, je copiais des maitres. Comme Hergé, Franquin, Gotlib, etc. Le plus dur, quand on a copié, c’est de devenir personnel. Un grand dessinateur, Hermann, m’avait dit : «il y a déjà eu un Hergé, un Franquin, un Gotlib. On n’a pas besoin d’un deuxième. Il faut que tu trouves ta voie.» Mais ce n’est pas facile. Parce qu’en voulant te détacher, tu fais des erreurs. Mais ces erreurs deviennent parfois un style. C’est comme ça qu’on reconnait le coup de dessin d’un dessinateur. Mais il ne faut pas en abuser non plus. »

Au moment de l’entretien, Serge Ferrand offre un premier conseil à Yacine Hamdi.

«Il faut savoir penser pour créer un scénario. Le texte est important. Si le dessin est bon mais que le texte est con, on ne le lira pas. Il faut avoir un texte qui se tient debout. Avec un début, un milieu et une fin. Après, il y a le dessin.»

Publication d’un album d’ici un an

Bien que le projet n’en est qu’à ses balbutiements, Yacine Hamdi souhaiterait un jour utiliser la BD pour illustrer d’autres thématiques sociales comme la sexualité, la santé mentale ou encore le multiculturalisme. «Mais là, il faut que je me concentre sur le sujet de l’itinérance», convient-il.

De même, les deux frères Hamdi voient le potentiel que leur projet devienne collaboratif. «Non seulement on voudrait humaniser et montrer la beauté dans la misère. Mais nous souhaitons aussi mettre de l’avant des artistes. C’est important. L’art est un moyen d’expression.»

Si tout va bien, Yacine et Medhi Hamdi devraient publier leur album d’ici un an, environ.

 

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