Le Val-Ouest

Les Québécois prêts à des pertes d’emplois et des investissements majeurs pour protéger le caribou

Les Québécois souhaitent que le gouvernement prenne des mesures musclées pour protéger le caribou forestier, acceptant même qu’il y ait des pertes d’emplois et des investissements majeurs pour y parvenir. C’est ce qui ressort d’une analyse réalisée par deux chercheurs québécois à partir d’un sondage scientifique mené par la firme Léger auprès de 1000 Québécois.

Ce sont deux chercheurs de l’Université Laval, Daniel Fortin, professeur à la Faculté des sciences et de génie, et Jérôme Cimon-Morin, de la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique, qui ont décidé de se pencher sur la question de l’opinion publique sur la protection du caribou forestier et montagnard.

« Nous étions plusieurs chercheurs à nous poser des questions sur l’opinion du public québécois », soutient Jérôme Cimon-Morin.

Avec son collègue, il a décidé de monter un questionnaire, qui a été validé par le comité d’éthique de l’Université Laval et par des pairs pour poser une dizaine de questions aux Québécois, notamment pour savoir à quel point ils sont favorables à la conservation du caribou et quelles mesures ils sont prêts à accepter pour le protéger. Les résultats de leur analyse ont été présentés dans une étude scientifique publiée dans le journal Science of the Total Environment.

Un fort appui

Le sondage sur lequel se base cette étude a été réalisé en ligne, entre le 9 et le 14 septembre 2022, par la firme Léger, quelques semaines après la tenue de la Commission indépendante sur les caribous forestiers et montagnards. Les répondants ont été sélectionnés pour être représentatifs de la population.

On y apprend notamment que seulement 47 % des répondants savent que les populations de caribous sont en déclin. Une fois informés que le caribou forestier est considéré comme vulnérable et que le caribou montagnard est menacé, 82% des répondants estiment que le gouvernement n’en fait pas assez pour protéger l’espèce, si l’on exclut les répondants qui préfèrent ne pas répondre à la question.

De plus, 84,3 % des répondants estiment que la protection des caribous est importante. Dans les régions où l’on retrouve des caribous, cet appui baisse légèrement, mais demeure tout de même très élevé, avec 81 % d’appui.

« Quand on regarde la littérature internationale, on constate un très grand appui pour les mesures de conservation, mais je ne m’attendais pas à voir un résultat au-delà de 80 % », remarque Jérôme Cimon-Morin.

La vaste majorité, 82,5 %, des répondants n’avaient jamais entendu parler de la commission indépendante sur le caribou. Dans le sondage, les deux scénarios proposés par le gouvernement du Québec dans le cadre de la commission sont par la suite présentés.

2 scénarios possibles

Dans le premier scénario, Québec proposait une baisse de la récolte de 2,5 % entre 2023 et 2028, ce qui entraînerait la perte de 841 emplois dans le secteur forestier. Ce scénario permettrait de conserver en partie les populations de caribous les plus vulnérables.

Dans le second scénario, le niveau de coupe forestière était rehaussé de 0,3 % et le nombre d’emplois était maintenu, mais il conduisait à la disparition des populations de caribous de Val-d’Or, de Charlevoix et du Pipmuacan.

Propositions rejetées

La réponse la plus populaire a été de rejeter les deux propositions, car 41 % des répondants jugeaient les mesures de protection insuffisantes, estimant que le gouvernement devait en faire plus. Le scénario 1 a reçu 36 % d’appui et le scénario 2, 10 % d’appui.

Lorsque les répondantes et les répondants étaient informés qu’aucun des deux scénarios ne suffirait à stopper le déclin du caribou, 76 % jugeaient la situation inacceptable et 83 % souhaitaient davantage d’investissements gouvernementaux du côté de la conservation de ce cervidé. En région où l’on retrouve des caribous, 62,4 % des répondants jugent que le gouvernement n’en fait pas assez pour la protection du cervidé.

PUBLICITÉ

« Les gens sont prêts accepter les conséquences liées à la protection du caribou, dont les pertes d’emplois et ils souhaitent que le gouvernement fasse des investissements majeurs pour la conservation », remarque Jérôme Cimon-Morin.

Une autre étude réalisée par Jérôme Dupras, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en économie écologique de l’Université du Québec en Outaouais (UQO), avait révélé que les Québécois sont prêts à payer 55 dollars par année, en moyenne, pour protéger le caribou, soit un montant de 259 millions à l’échelle provinciale.

« Les actions du gouvernement actuel dans ce dossier ne vont pas dans le sens souhaité par la population », concluent les chercheurs rattachés au Centre d’étude de la forêt de l’Université Laval.

À lire aussi : 2 août, jour du dépassement de la Terre

 

Une nouvelle, un événement à faire paraître?

Ayez le réflexe VAL-OUEST

Lire aussi...