Le Val-Ouest

La médiation citoyenne pour éviter des frais juridiques coûteux

Éviter de coûteux frais juridiques, c’est possible. Pour y arriver, les citoyens, organismes, municipalités ou entreprises du Val-Saint-François peuvent faire appel à la médiation citoyenne. Un service gratuit, bien qu’encore peu connu, offert depuis trois ans par Equijustice Estrie.

De fait, même si ces services existent depuis environ une vingtaine d’années au Québec, ils sont peu utilisés dans la région. « Les gens sont toujours surpris quand on leur en parle. Je souhaite changer ça », promet Carlo Payeur, gestionnaire de l’unité de médiation du Val-Saint-François et médiateur.

Soutien financier de la Chambre des notaires

Depuis deux ans, la Chambre des notaires subventionne en partie la médiation citoyenne par le biais de son Fonds d’études notariales. Un appui qui se termine le 31 mars 2024. Pour continuer à offrir ces services dans le Val, Equijustice Estrie a entrepris des démarches pour interpeller les élus municipaux et la MRC pour obtenir leur soutien financier.

Carlo Payeur, gestionnaire de l’unité de médiation du Val-Saint-François et médiateur, souhaite mieux faire connaître les services gratuits de médiation citoyenne offerts dans la région. (crédit photo : Equijustice Estrie)

Gérer un conflit et ses conséquences

Pourquoi choisir de régler un conflit? Parce qu’il génère parfois de fâcheuses conséquences. « Ça peut avoir une incidence sur la santé mentale. Il y a aussi des impacts économiques, quand on pense à tout ce ça coûte de poursuivre quelqu’un en cour », rappelle Carlo Payeur.

La médiation, pour tout type de conflit

La médiation citoyenne est offerte pour tout type de conflit, civil ou criminel, sauf les séparations de couples et les gardes d’enfants. Pour ces deux cas, des médiateurs sont déjà payés par le gouvernement. L’organisme n’offre pas non plus de services d’ « urgence », si une personne souhaite que son cas se règle très rapidement.

Des exemples : une chicane entre deux voisins à cause du bruit, des feuilles tombées dans une piscine, un arbre coupé ou la délimitation peu claire entre deux terrains. Il peut aussi s’agir d’un litige vis-à-vis d’un organisme ou d’un commerçant. Ou encore une situation de conflit entre deux employés d’une même entreprise.

Une équipe dédiée au Val-Saint-François

Dans le Val, l’équipe compte cinq bénévoles sous la supervision de Carlo Payeur. « Les bénévoles sont des gens qui ont le goût de s’investir auprès de leur communauté en aidant les autres à mieux gérer leurs conflits », explique-t-il. Les bénévoles suivent 27 heures de formation, à la suite de laquelle ils sont coachés pendant plusieurs mois par des médiateurs aguerris. Ils et elles sont ensuite en mesure d’offrir des services de médiation, sous la supervision de l’organisme.

Ni victime, ni coupable

Changement de paradigme majeur : dans cette approche, il n’y a ni victime, ni coupable. « Nous servons les deux parties impliquées de la même façon. Pour nous, elles sont au même niveau. Nous accueillons leur réalité et voyons s’il y a un dialogue possible, ainsi qu’une convergence et une congruence », expose Carlo Payeur.

Consentement et volontariat des deux parties

L’un des éléments-clés de la démarche est le volontariat. Il se peut qu’une des parties refuse de participer. « Quand l’autre se retire, les gens sont déçus. Ils se sentent parfois obligés d’aller vers une autre voie juridique. De notre, côté, nous ne sommes pas froissés si l’échange n’a finalement pas lieu. Parfois, ça fait du bien aux personnes de nous rencontrer et d’exposer leur situation. Bien qu’on ne soit ni des thérapeutes, ni des psychologues, nous leur offrons une écoute attentive. Elles se sentent écoutées comme elles ne l’ont peut-être jamais été dans leur vie », spécifie Carlo Payeur.

Une approche relationnelle

Chaque intervention est toujours offerte par deux co-médiateurs qui travaillent en partenariat. Tout est confidentiel et gratuit. L’organisme vise d’abord et avant tout une approche relationnelle. Une façon de faire développée par des chercheurs et des médiateurs, dont le fondateur d’Equijustice, Serge Charbonneau. Ce dernier a d’ailleurs publié en 2020 l’ouvrage La médiation relationnelle – Rencontres de dialogue et justice réparatrice aux éditions L’Harmattan.

Le livre “La médiation relationnelle – Rencontres de dialogue et justice réparatrice” explique l’approche adoptée par Equijustice pour offrir ses services de médiation citoyenne.

Pas de conseils juridiques

Fait important : les médiateurs n’offrent aucun conseil juridique aux personnes qui les consultent. « Les gens aimeraient parfois qu’on leur dise quoi faire. Ce n’est pas notre service. Notre expertise, c’est de préparer les personnes à une médiation », précise le gestionnaire de l’unité de médiation.

En contrepartie, les médiateurs offrent des références pour permettre de trouver les informations pertinentes à la gestion d’un conflit. « Nous les référons toujours à la bonne porte. En regardant d’abord s’il y a des services gratuits, comme par exemple Educaloi ou encore les cliniques juridiques de l’Université de Sherbrooke. Il peut aussi s’agir d’une banque d’heures de conseils juridiques gratuits offerts par des assurances. Souvent, les gens n’y ont même pas pensé », rapporte Carlo Payeur.

« On ne dit pas aux gens comment faire »

Une fois que la personne a en main tous les renseignements, les médiateurs la soutiennent dans sa démarche : que souhaite-t-elle demander, quelles sont ses attentes, etc. Si elle est prête à envisager un dialogue avec l’autre, elle obtiendra du soutien. « Nous lui demanderons comment elle souhaite inviter l’autre personne pour une rencontre. Que souhaite-t-elle lui dire? Qu’est-ce qu’elle attend de l’autre? Comment va-t-elle nommer le conflit? Nous posons des questions, mais nous ne disons pas aux gens comment faire. Nous souhaitons les faire réfléchir et les responsabiliser. »

Une rencontre préparée d’avance

S’il y a une rencontre virtuelle ou physique, acceptée par les deux personnes, tout sera préparé d’avance. Rien n’est laissé au hasard : heure d’arrivée, où les gens vont s’asseoir, qui parle en premier, etc. « En leur offrant davantage de contrôle vis-à-vis de la situation qu’ils vivent, les gens se sent plus en sécurité pour aborder le problème », soutient Carlo Payeur.

Le plus souvent, les rencontres physiques ont lieu dans un espace neutre, comme un hôtel de ville, un centre d’action bénévole, un CLSC ou les bureaux de l’organisme à Sherbrooke. Après la rencontre, chaque personne est rencontrée pour voir comment ça s’est passé et si elle a d’autres besoins.

Sécurité, soutien, accompagnement

Les co-médiateurs visent à accompagner les personnes dans chacune des étapes du processus : exploration de la situation, préparation, recherche d’information, scénarisation de la rencontre, etc. Les mots-clés : sécurité et soutien. À n’importe quelle étape du processus, une personne peut décider de mettre fin à la démarche et de se tourner vers les services d’un avocat.

« Au final, certains sont heureux de la démarche, d’autres moins parce qu’ils n’ont pas eu tout à fait ce qu’ils voulaient. Mais au moins, ils ont été accompagnés », soutient Carla Payeur.

 

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