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« Quand les mains travaillent, c’est l’âme qui danse »

« Quand les mains travaillent, c’est l’âme qui danse ». C’est dans ces termes que Diane Ferland illustre le travail des artistes et des artisans qui créent avec leurs mains. Jusqu’au 1er octobre prochain, elle présente sa plus récente exposition « Les arbres s’ennuient » à la Maison de la culture de Racine.

Chaque geste est important pour l’environnement

« J’ai réalisé qu’il y avait moins d’oiseaux chez moi. Je me suis dit : les arbres doivent s’ennuyer. C’est de là qu’est venue l’idée de créer des oiseaux qu’on pourrait mettre en permanence dans les arbres. Ce sont des rappels : chaque petit geste que nous faisons est important pour l’environnement. C’est ainsi qu’on va s’en sortir », explique l’artiste.

La pérennité des métiers d’art, un enjeu

Diane Ferland a à cœur la transmission et la pérennité des métiers d’art. « Ils font partie du patrimoine immatériel. Le savoir-faire des artisans est une bibliothèque humaine qu’il faut préserver. Si les artisans ne peuvent pas vivre de leur savoir-faire, ils vont non seulement arrêter d’en faire, mais aussi de transmettre leur savoir-faire. Il s’agit d’un enjeu très important », croit-elle. Elle donne pour exemple de l’Estrien Denis Lambert qui exerçait le métier de dinandier. C’est-à-dire un artisan qui fabrique des objets utilitaires ou décoratifs en cuivre. Elle explique que l’homme est décédé en 2023, sans avoir de relève.

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Diane Ferland explique les oiseaux de l’exposition sont des rappels : « Chaque petit geste que nous faisons est important pour l’environnement. C’est ainsi qu’on va s’en sortir. » (photo : Maison de la culture de Racine)

« Tu achètes une partie de l’âme de quelqu’un »

Pour elle, l’une des solutions est de sensibiliser le public à mieux comprendre et apprécier à sa juste valeur le travail des artistes et artisans. « Il faut que les gens osent davantage acheter des produits des métiers d’art. C’est sûr que tu peux acheter un oiseau en ciment dans les grandes surfaces. Tu vas peut-être payer 12 $ et il sera fabriqué en Chine. Mon plus petit oiseau, je ne peux le vendre en bas de 40 $. Mais si tu achètes une pièce comme celle-là, tu achètes une partie de l’âme de quelqu’un. C’est une continuité de vie qui entre chez toi. Ce sont ces petits gestes-là qui font que l’artisan peut recevoir un salaire », témoigne-t-elle avec passion.

À cet égard, elle pense que la « Politique du 1 % » du gouvernement du Québec va dans le bon sens. Cette politique oblige l’intégration d’une œuvre d’art dans tout projet de construction, d’agrandissement ou de réaménagement de plus de 150 000 $, financé par l’État et ouvert au public. Elle croit que les municipalités pourraient elle aussi emboîter le pas.

Premières femmes à posséder un atelier de verre en fusion

Diane Ferland est une pionnière dans son domaine. Après avoir enseigné au secondaire pendant quelques années, elle a pris une pause, au début des années 1990, pour aller étudier en Techniques du verre au Cégep du Vieux-Montréal. Résultat : elle n’est jamais retournée enseigner. Elle a plutôt démarré, en 1995, l’atelier de verre Cassandre avec sa collègue de classe Sylvie Bélanger. Toutes deux ont été les premières femmes au Québec à posséder un atelier de verre en fusion. Elles se sont spécialisées dans la technique du verre coulé dans des moules de sable.

Changement de cap

Après le décès de Sylvie Bélanger, en 2013, Diane Ferland a réorienté ses projets. Elle a vendu son Bed & Breakfast Au Blanc Marronnier, situé à Racine. Puis, en 2021, elle se départit aussi de la bâtisse, au cœur du village de Racine, où se trouvait son atelier. Le lieu a été racheté par le céramiste Marc-Antoine Dorval. Diane Ferland a depuis installé ses équipements dans sa nouvelle maison à Valcourt.

Elle se sent entamer une nouvelle étape de sa vie. « Ça fait 30 ans que je travaille le verre. Je prends ma retraite de la production. Un atelier comme le nôtre coûtait une fortune à faire fonctionner. Ça nous coûtait 2000 $ de gaz par mois, sans compter les assurances, l’électricité, etc. Il fallait donc en vendre beaucoup. Le mythe de l’artiste est à démolir. Parfois, des gens me disaient : tu es chanceuse, tu fais de l’art, des affaires que tu aimes. Oui, mais seulement 5 % du temps. C’était comme produire des tartes aux pommes. Ce n’était plus de l’art. C’était un métier pour gagner sa vie. » De fait, ses œuvres étaient vendues en grande partie aux États-Unis. L’entreprise créait aussi des pièces d’intégration architecturale et des cadeaux corporatifs.

À l’aide d’un ami forgeron, Diane Ferland a, pour la première fois, créé un immense arbre en métal. Celui-ci est au cœur de l’exposition présentée à la Maison de la culture de Racine. (photo : Sébastien Michon – Le Val-Ouest)

« Lorsque tu crées, tu te connectes à ton centre vital »

Elle souhaite désormais revenir à l’art. On peut d’ailleurs en voir les résultats avec « Les arbres s’ennuient ». L’artiste a créé différents modèles d’oiseaux à partir de quatre matériaux : verre, céramique, bronze et ciment. Elle a aussi conçu pour la première fois, à l’aide d’un ami forgeron, un immense arbre en métal qui est au cœur de l’exposition.

On sent tout le plaisir qu’elle a de renouer avec ses passions. « Lorsque tu crées, tu vas chercher quelque chose en toi. Tu te connectes à ton centre vital, à tes « trippes ». D’une certaine façon, tu te laisses exploser », confie-t-elle.

« Il faut que j’accélère mon bonheur »

« Ginette Reno qui disait : « Vous savez, à l’âge que je suis rendue, il faut que j’accélère mon bonheur ». Et je trouve l’expression très belle. C’est un travail qui est dur physiquement. Alors pendant que j’en suis encore capable et que j’ai de l’énergie, je souhaite davantage explorer et m’amuser! », clame Diane Ferland avec enthousiasme.

L’exposition « Les arbres s’ennuient » est accessible tous les samedis et dimanches jusqu’au 1er octobre prochain à la Maison de la culture de Racine, 348, rue de l’Église à Racine.

 

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