photo : Sébastien Michon - Le Val-Ouest
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La MRC du Val-Saint-François a organisé à Racine, le 12 novembre dernier, des ateliers participatifs sur les énergies renouvelables (solaire, bioénergie, géothermie et éolienne). Qui s’adressaient, de façon distincte, aux acteurs du milieu (organismes, entreprises, élus, etc.) en après-midi et aux citoyens en soirée. Plusieurs citoyens ont profité de cette tribune pour interpeller la MRC et exprimer qu’ils ne se sentent pas assez informés dans le dossier de l’éolien.

Objectif : la publication d’un guide

Au total, 95 personnes ont participé à ces ateliers de discussion au Centre communautaire de Racine. Une activité qui s’inscrit dans une vaste réflexion sur les énergies renouvelables amorcée par la MRC en mai dernier et qui devrait se terminer en mars 2025.

Au terme de ce chantier de travail de plusieurs mois, la MRC souhaite publier un guide pour encadrer l’implantation de projets sur son territoire. Non seulement pour l’éolien, mais aussi pour tout projet d’énergie solaire, de bioénergie et de géothermie. Ces balises devraient ensuite se retrouver dans le schéma d’aménagement et possiblement dans les règlementations municipales.

Une section du site web de la MRC est d’ailleurs entièrement consacrée aux énergies renouvelables.

En après-midi, un peu plus d’une quarantaine d’acteurs du milieu ont participé aux ateliers de discussion. Des citoyens ont quant à eux participé au même exercice, organisé en soirée.  (photo : Sébastien Michon – Le Val-Ouest)

«La transition énergétique, mais pas à n’importe quelle condition»

Les ateliers proposés le 12 novembre font suite à une séance d’information citoyenne qui a lieu à Windsor le 20 juin dernier. À laquelle participait Hydro-Québec ainsi que des entreprises et organismes.

«Nous voulons faire partie de la transition énergétique, mais pas à n’importe quelle condition. Qu’est-ce qui serait acceptable? Quelles sont les limites de l’acceptation? Où veut-on aller et jusqu’où ne veut-on pas aller? L’exercice va nous permettre de définir nos propres conditions d’acceptabilité pour le Val-Saint-François», explique d’emblée Geneviève Giasson, directrice générale de la MRC du Val-Saint-François.

La directrice précise que dans de tels exercices, toute opinion est la bienvenue. «Tout doit pouvoir s’exprimer. Il ne faut pas empêcher que des positions plus tranchées s’expriment.»

Confusion entre «ateliers participatifs» et «séance d’information»

Alors que les ateliers participatifs de l’après-midi, qui réunissaient des organisations et des élus, s’est déroulée plutôt rondement, une certaine confusion régnait en soirée. Une partie des personnes présentes pensaient assister à une séance d’information sur la possible implantation de projets d’énergie éolienne dans le Val-Saint-François. Et non de participer à une activité qui visait à recueillir leurs opinions sur quatre types d’énergies renouvelables.

La séance de clôture, qui a duré une vingtaine de minutes en après-midi, s’est ainsi prolongée pendant presque une heure en soirée. Plusieurs citoyens profitant de l’occasion pour faire connaître publiquement leurs interrogations et leurs inquiétudes. Cherchant aussi à obtenir des renseignements sur l’état de la situation.

La séance de clôture des ateliers s’est prolongée pendant presque une heure en soirée. Plusieurs citoyens profitant de l’occasion pour faire connaître publiquement à la MRC leurs interrogations et leurs inquiétudes.  (photo : Sébastien Michon – Le Val-Ouest)

«Je suis venu pour entendre parler des éoliennes»

«Je ne suis pas venu ici pour faire des comparaisons entre les différents types d’énergie, mais plutôt pour entendre parler de projets d’éoliennes. Savoir quelles informations nous avons et comment nous allons gérer ça», a fait savoir un citoyen.

Une autre personne a ajouté : «J’ai des craintes parce que je manque d’informations. Avant de dire oui, il faut que j’aie plus d’informations.»

Pierre Tétrault, préfet de la MRC et maire de Valcourt a tenu à remettre l’activité dans son contexte.

«Il n’y a pas de décision qui se prend ce soir. Nous sommes là pour vous consulter, connaître vos appréhensions et vos questionnements. Ce sont des intrants pour alimenter une réflexion.»

Ce à quoi certains citoyens ont répondu qu’ils n’étaient pas présents à la séance d’information organisée en juin en Windsor. Et qu’ils auraient aimé que ce type d’activité se répète. Pour être davantage éclairés sur les enjeux et pouvoir ensuite émettre des opinions et jugements éclairés.

Pierre Tétrault, préfet de la MRC, a tenu à rassurer les citoyens qu’aucun projet éolien n’était actuellement en cours dans le Val-Saint-François.  (photo : Sébastien Michon – Le Val-Ouest)

«Il faut profiter de cet espace de consultation»

Voyant que le ton de certains échanges commençait à monter, un citoyen a tenu à reconnaître les aspects positifs de la démarche.

«J’avais beaucoup critiqué la MRC il y a quelques année dans le dossier des mégaporcheries. Mais aujourd’hui, je vais la défendre. Dans plusieurs autres MRC, les gens ne sont pas consultés. Il y a peut-être des choses à améliorer sur le processus de décision, mais il faut profiter de cet espace de consultation.»

De fait, le dossier de l’éolien suscite de vives inquiétudes dans certaines régions où la population s’est retrouvée face à des projets déjà en branle. Par exemple à Salaberry-de-Valleyfield ou dans la MRC de Coaticook.

Une démarche possiblement unique au Québec

Bien que le Val-Ouest n’ait pu le confirmer, il semblerait que cette démarche d’analyse, de réflexion et de consultation, afin de se doter de balises, serait la seule du genre au Québec.

«Je crois que nous sommes assez novateurs. Je suis allé chercher cette idée en France, où ils ont conçu un modèle de guide. Ils ont une trentaine d’années d’avance sur nous. Notamment sur les projets éoliens et solaires», révèle Geneviève Giasson. Elle ajoute que d’autres MRC, ailleurs au Québec, s’intéressent à ce qui se fait actuellement dans le Val-Saint-François.

Pour la directrice, ce pas de recul pour clarifier la vision régionale, avant toute implantation de projets, est fondamentale. «Sinon, on se ferait pousser dans le dos», glisse-t-elle.

Geneviève Giasson, directrice générale de la MRC du Val-Saint-François, dit que la démarche s’inspire de ce qui a été fait en France.  (image : Mellois en Poitou)

Actuellement, aucun projet éolien dans le Val

Comment la MRC en est-elle arrivé là? Tout a débuté lorsqu’Hydro-Québec avait rendu public un appel d’offres, en 2023, pour l’implantation d’éoliennes sur le territoire québécois. Le Val-Saint-François avait alors été ciblé comme zone admissible. Finalement, aucun des huit projets éoliens choisis n’a eu lieu dans le Val-Saint-François.

L’appel d’offres d’Hydo-Québec, en 2023, visait de potentiels projets éoliens sur le territoire de la MRC du Val-Saint-François. Dans la région «Des Cantons» sur la carte. Finalement, aucun promoteur n’a été retenu par Hydro-Québec pour des développements dans le Val.  (images : Hydro-Québec)

«Faire partie de la transition, mais pas n’importe comment»

C’est dans ce contexte que la MRC a alors choisi d’être proactive pour la suite des choses.

«J’avais dit au précédent préfet [Luc Cayer] : on voudrait se fermer les yeux et faire comme si ça n’existait pas. Mais on ne peut pas. C’est là, maintenant. Qu’est-ce qu’on fait? On essaie de comprendre. De définir notre vision et nos conditions. Puis d’avancer. Nous voulons faire partie de la transition énergétique et faire notre part. Mais pas n’importe comment», marque Geneviève Giasson.

«Nous voyons l’intérêt de s’y prendre à l’avance pour établir nos conditions et nos règles. Ce qui fait que si Hydro-Québec refait éventuellement des appels d’offres, nous serons prêts et nous ne serons pas à la dernière minute», ajoute-t-elle.

Comité directeur de neuf élus

La démarche se déploie à la fois à l’interne, avec des travaux pilotés par un comité directeur composé d’élus du Val. Et à l’externe, par des rencontres avec des experts. Ainsi que par le biais de séances, ateliers et sondage auprès de citoyens.

Les neuf élus qui font partie du comité directeur sont : Jacques David (Bonsecours), Herman Herbers (Cleveland), James Johnston (Canton de Melbourne), Mario Côté (Racine), Daniel Veilleux (Saint-Denis-de-Brompton), Adam Rousseau (Saint-François-Xavier-de-Brompton), Hervé Provencher (Saint-Claude), Rolland Camiré (Val-Joli) et Pierre Tétrault (Valcourt et préfet de la MRC).

Les entreprises cognent aux portes

Bien qu’il n’y ait aucun projet éolien accepté dans le Val, des entreprises sont déjà à l’œuvre dans la région. Certaines sont carrément aller cogner aux portes dans les derniers mois, comme le rapportait un article du Val-Ouest en juillet dernier.

Leurs démarches ont un double objectif. D’un part, d’installer, pendant quelques mois, des appareils pour tester les vents. Ce qui leur permettra de connaître le réel potentiel éolien. Et, d’autre part, connaître l’intérêt de propriétaires pour installer des éoliennes chez eux, si des projets voyaient le jour.

Quatre promoteurs ciblent actuellement certaines municipalités du Val : BluEarth Renewables (Calgary) et Plan A (Montréal), Kruger Énergie (Montréal), Eolectric (Brossard) et Innergex (Longueuil).

Quatre promoteurs ciblent le Val-Saint-François pour leurs projets : le consortium BluEarth Renewables (Calgary) et Plan A (Montréal), Kruger Énergie (Montréal), Eolectric (Brossard) et Innergex (Longueuil).  (photomontage : Le Val-Ouest)

Mettre des conditions aux promoteurs

Cette démarche pourrait-elle bloquer d’éventuels projets éoliens? Non, répond Pierre Tétrault.

«C’est une prérogative qui appartient à Hydro-Québec. Mais un promoteur qui ne respecterait pas les conditions qu’on se donne aurait beaucoup moins de chances de voir son projet être accepté. Notre travail est important parce qu’on vient définir quelles sont les conditions que les promoteurs doivent respecter pour faire un projet dans le Val-Saint-François.»

Sondage en ligne dès le 2 décembre

La MRC souhaite maintenant poursuivre sa démarche de consultation en mettant en ligne un sondage, le 2 décembre prochain. Le sondage sera accessible à partir de la page consacrée aux énergies renouvelables sur le site web de la MRC.

«Ce ne sont pas tous les gens qui sont à l’aise de s’exprimer lors d’un atelier ou qui peuvent se déplacer. Mais ces personnes ont par ailleurs des choses à dire. Elles vont donc pouvoir faire connaître leur avis en participant au sondage. Qui sera complémentaire aux ateliers», expose Geneviève Giasson.

«Nous souhaitons construire une vision commune. Il nous faut donc identifier ce qui est le plus fort dans ce que les gens vont dire. Autant dans les ateliers que dans le sondage. C’est ce qui deviendra notre tronc commun», précise-t-elle.

Geneviève Giasson, directrice générale de la MRC du Val-Saint-François et Pierre Tétrault, préfet de la MRC et maire de Valcourt.  (photo : Sébastien Michon – Le Val-Ouest)

D’autres séances ou ateliers sont-ils prévus?

Compte tenu que certains citoyens exprimaient le besoin qu’il y ait d’autres séances d’information ou de consultation, la MRC envisage-t-elle d’en organiser, même si ce n’était pas prévu à son plan de travail? On dit manquer de recul pour se prononcer là-dessus. «Si nous organisons d’autres séances, ça représente des frais supplémentaires. Mais nous ne sommes pas fermés», exprime Pierre Tétrault.

La MRC a mandaté la firme Votepour.ca, spécialisée dans l’organisation d’activités de participation citoyenne, pour prendre en charge cette rencontre. Ce qui engendre des coûts.

Marc Jeannotte (debout), cofondateur et directeur général de la firme Votepour.ca, et son équipe animaient les ateliers.  (photo : Sébastien Michon – Le Val-Ouest)

Exclure les éoliennes, une option?

Si jamais les résultats des ateliers et du sondage en ligne démontraient une forte opposition aux éoliennes, la MRC pourrait-elle carrément en interdire l’implantation sur son territoire?

«Ce serait possible, mais nous sommes loin d’être dans une telle situation. Nous sommes encore au stade d’évaluer les possibilités. Si nous n’avons pas l’appui de la communauté et que les citoyens nous font savoir qu’ils sont vraiment contre, eh bien nous n’irons pas à l’encontre de leur volonté», indique Pierre Tétrault.

Parmi les commentaires partagés par les citoyens lors des ateliers de discussion, plusieurs étaient défavorables à l’énergie éolienne. Les résultats du sondage en ligne indiqueront si ce point de vue est partagé plus largement ou non dans l’ensemble de la région.  (photo : Sébastien Michon – Le Val-Ouest)

À court terme : l’énergie solaire

La MRC croit que le prochain appel d’offres d’Hydro-Québec concernant les éoliennes devrait être connu vers la fin de 2025 ou au début de 2026. Le Val-Ouest n’a toutefois pas pu confirmer cette information auprès d’Hydro-Québec. On ne sait pas non plus si ces éventuels appels d’offres cibleront ou non le territoire du Val-Saint-François.

Ce qui est certain, c’est que la société d’État devrait, d’ici le 31 décembre 2024, rendre public un premier appel d’offres concernant des projets solaires sur le territoire québécois. Le second sera lancé au plus tard le 31 décembre 2026. Ce qui, au final, totalisera un bloc de 300 mégawatts d’électricité générée par de l’énergie solaire.

Les décrets 1376-2024 et 1377-2024 du gouvernement, publiés le 3 septembre dernier dans la Gazette officielle du Québec, en indiquent les modalités.

Des promoteurs seraient-ils intéressés à installer des panneaux photovoltaïques dans le Val? Pour le moment, cette information n’est pas disponible.

Hydro-Québec devrait rendre public un premier appel d’offres pour de l’énergie solaire d’ici le 31 décembre 2024. Des panneaux seront-ils installés dans le Val-Saint-François? Pour le moment, cette information n’est pas disponible.  (image : Le Val-Ouest (Microsoft Designer))

«Le rapport de confiance est important»

Geneviève Giasson se dit satisfaite de l’activité du 12 novembre. «Il y a eu de petites frictions, mais je suis très satisfaite de l’ensemble de la rencontre. Nous nous attendions à ce qu’il y ait toutes sortes d’opinions exprimées. Parce que sont des sujets sensibles et délicats. C’est important que tous les points de vue s’expriment.»

Elle précise :

«Le consensus est à peu près impossible quand on parle de gros projets. Les éoliennes font peur pour différentes raisons. Cette sensibilité est exacerbée par ce qui est vécu actuellement dans d’autres territoires. Il ne peut pas y avoir de consensus parce que c’est trop sensible. Mais il faut arriver à trouver des compromis. Pour cela, on doit prendre le temps de sonder les gens plus largement et d’analyser tout ça. Ce ne sont pas des projets qui peuvent se développer sans acceptabilité.»

Elle dit en tirer une leçon. «Le rapport de confiance est important et fragile. Si on brusque les choses, on perd la confiance des gens. On doit prendre soin de ce qui vient teinter la compréhension et les perceptions. Nous devrons aussi communiquer davantage. En déployant un ensemble de moyens de communication pour s’assurer que l’information rejoint les gens et qu’ils la comprennent.»

 

POUR EN SAVOIR PLUS : 

Reportage réalisé par la télévision communautaire TVME.

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